"La meilleure façon de réaliser ses rêves, c'est de se réveiller!" - Paul Valéry


Wednesday, September 5, 2007

En terre Sikh

42h de train, 10h de bus, Delhi!!
J'arrive dans la capitale fatigue, mais heureux. Le train ralenti doucement son allure pour entrer en gare de New Delhi. Dehors, de vielles carcasses de train jonchent les voies ferrees, des indiens aux habits de fortune se savonnent meticuleusement aux robinets, des colis enfermes dans des sacs de jutte attendent patiemment sur le quai et des mendiants et des hommes d'affaires se croisent dans l'indifference aux abords des trains.
Par la petite fenetre du wagon, j'appercois de grandes avenues, larges et bien entretenues. Le ton est donne: lampadairs flambant neufs, feux rouges synchros, de l'ordre dans les files de voitures; tout est fait ici pour donner une image moderne de l'Inde.
Pourtant, il ne me faudra pas longtemps pour retrouver l'Inde que je connais, 2 crochets a droite, 3 crochets a gauche et me revoila de le brouhaha et l'agitation du pays!
Je trouve une petite guest house aux chambres propres qui fera l'affaire pour la nuit. Le lendemain, je m'en vais prendre mon avion pour un saut de puce de 30 min a peine. Direction le Pujab, au Nord Ouest de Delhi, la terre d'origine des Sikhs.
Dans l'avion, je fais la connaissance d'Amrit, un Sikh d'une quarantaine d'annees. Il est bien habille, porte un magnifique turban blanc et une jolie petite barbe grisonnante. Il me confie qu'il est ingenieur mecanicien sur un petrolier pour esso et revient de plus de 3 mois en mer.
Je suis bien loin des mes rencontres que j'ai fait jusqu'alors. Comme un impression d'avoir literalement change d'Inde. Il y a deux jours, je voyagais dans des bus uses sur des routes defoncees et perdues dans la campagne du Maharastra, je galerais pour me faire comprendre par des indiens qui me parlaient en Maharastri et je cotoyais des indiens en dhoti pour la plupart illetres. Aujourd'hui, me voila dans l'Inde d'en haut, a parler de choses et d'autres avec des indiens riches et cultives. Un des paradoxes de ce pays.
Je sympathise avec Amrit. Il est adorable et lorsqu'il apprend que je voyage seul, il insiste pour que je vienne boire le the chez lui et qu'il me presente a sa famille. Je suis touche et accepte poliment. A notre arrivee, nous nous glissons dans un rickshaw, direction le college de filles d'Amritsar ou il vit avec sa femme et ses deux garcons. Il habite une mignonne petite maison, pas tres bien eclairee mais joliment meublee. Ses deux fils sont la, deux jumeaux d'une quinzaine d'annee. Il ne portent par leur turban, aussi je devine leur chevelure attachee en boule au dessus de leur tete, ce qui est rare. Amrit eclate de joie et sert ses deux enfants de toute ses forces dans ses bras et les couvre de baisers. Je me sens de trop dans la piece. La scene est tres touchante, celle d'un pere retrouvant ses enfants apres plusieurs mois d'absence. J'aimerais me faire tout petit. Amrit ne tarde pas a dire a ses deux garcons de me saluer egalement, cela me gene. J'aimerais que leur retrouvailles ne finissent jamais. Amrit appelle alors sa femme pour qu'elle rentre, elle nous prepare un excellent chai, avant de repartir travailler. A son arrivee, je n'arrive a discerner aucune emotion sur le visage de la jeune femme. Elle semble avoir vu Amrit hier, c'est comme si ils ne s'etaient jamais quittes. Bien sur, en Inde on ne montre aucun signe affectif conjugal en public, mais ici, outre la platonicite de leur retrouvailles, c'est toute la scene qui me laisse perplexe.
Amrit est au petit soin avec moi, il ira meme jusqu'a me deposer en ville en moto. Lorsque vient le moment de se quitter, je le remercie pour son hospitalite et sa gentillesse et je repars chercher un coin ou passer la nuit.
En debut de soiree, j'attrape un bus local, direction la frontiere pakistanaise! 2h de route dans l'agitation de l'Inde, zizags au milieu de chars a boeufs, velos, rickshaws, moto, et vaches! Sur la route, des vendeurs de fruits et legumes foisonnent sur le bas cote. Mon voisin de siege semble curieux a mon egard. Il est assis de maniere peu confortable, avec un gros sac de paille entre les jambes. Il porte une longue et belle barbe blanche, ainsi qu'un turban orange maladroitement enroule sur la tete. Il a la peau tanee par le soleil et deux yeux d'une clarte rare chez les indiens. Il me parlera tout le long du trajet en Panjabi! Je m'efforcerai de lui expliquer que je ne comprends pas le Panjabi mais il continuera de plus belle apres quelques "Acha Acha" (OK en Hindi).
A mon arrivee, je dois faire les 2 derniers kilometres en rickshaw. Mon jeune chauffeur pedale a une vitesse effarante. J'arrive a la frontiere a temps pour assister a la traditionnelle fermeture de la frontiere Indo-Pakistanaise. Grand moment de demonstration militaire! De part et d'autre de la frontiere, des tribunes enormes remplies d'autochtones. Des deux cotes, le drapeau flotte fierement mais les couleurs vivent des saris et des kurtas des indiens contrastent avec les couleurs fadent, blanches et marrons des pakistanais. Sinon de part et d'autre c'est la meme chanson, la foule en delire applaudie son armee qui defile fierment sur le tarmac. Cote indien on scande haut et fort "Hindustan Zindabar" comprenez "La mere Inde". Un speaker fait reprendre la foule surexcitee, et les sifflets pleuvent quand c'est au tour de l'autre pays de parader. La scene est hillarante! L'ambiance est bonne enfant, sur fond de nationalisme exacerbe. Des deux cotes, on parade comme des coqs et on bombe le torse, c'est a celui qui marchera le mieux au pas! Et pas question de se laisser impresionner par la performance de l'autre cote! Apres 40 min de demonstration de force, un garde de chaque pays s'avance pres du portail frontiere et les deux hommes se serrent la main! Mais attention, les deux hommes ne s'attardent pas, et repartent fierment de leur cote. Il parait qu'il fut un temps ou ils etaient pret a se taper dessus, les tensions entre les deux pays s'etant maintenant apaisees, la ceremonie est devenue un vrai spectacle pacifique pour les gens de la region et les gens de passage.
Apres 3h de bus, je suis de retour a Amritsar. Je decide d'aller voir le temple d'or de nuit, joyaux des Sikh et si cher dans le coeur. Je dois me couvrir les cheveux pour penetrer dans l'enceinte du monument. Quand le temple apparait a mes yeux, je suis souffle! Il est magnifique! Il semble flotter sur le lac sacre, illumine de mille feux. Je reste un moment a le contempler et admirer sa beaute avant de m'avancer vers lui. Il n'a rien a envier au Taj Mahal. Les lieux eux memes sont berces d'une atmosphere mystique. Nombreux Sikh m'interpellent poliment et sont curieux de ma venue ici. Il ont tous tres envie de me faire partager leur religion et leur lieu sacre. Je les sens tres fiers d'etre Sikh.
Je rencontre Jasbir au bord du lac qui m'invite a m'asseoir avec lui. Je passerai 3h assis au bord de l'eau a ecouter Jasbir me parler de sa religion tout en contemplant le magnifique monument qui se dessine devant nous. Jaspir a une voix douce et semble d'une extreme tolerance, on parle de religion; je lui parle de la notre, qu'il ne connait pas tres bien, et lui, me relate leur vision des choses. Le lieu lui meme appelle au calme et a la priere. Je me sens bien ici, au calme et au repos. Apres son depart, je resterai encore quelque temps dans ce lieu rempli d'histoire, a contempler ce joyaux si cher dans le coeur des Sikhs.
Au petit matin, je retourne au temple pour admirer les magnifiques gravures d'or dont les murs sont couverts. Une petite musique berce toute l'enceinte du temple, a l'interieur des musiciens Sikh jouent sans s'arreter, se relayant toutes les heures, depuis plus de 400 ans! Le lieu est toujours aussi magique de jour. Je croiserai une poignee de touristes sur les lieux, bien dommage car ce temple et cette atmosphere valent a eux seuls le deplacement ici. L'interieur du temple est splendide, fait de fines mosaiques d'or. Nombreux Sikh sont assis par terre a lire une petite version du 'Holly Book' et un grand Sikh "sage" lit une version originale de celui ci; Il fait face a tous les autres. La cadre et l'atmosphere qui se degage ici sont magiques.
A midi, je decide d'aller tester la cantine du Temple d'or. Des milliers de repas servis gratuitement et a la chaine. Les indiens se bousculent a l'entree pour obtenir un plateau. Derriere, nombre de personnes s'activent pour preparer la nourriture. Sous un preau sombre, j'observe les rouleurs et autres cuiseurs de chapati, il travaillent avec une dexterite et une rapidite etonnante! Tout ca me donne faim, meme si au premier abord rien a l'air tres appetissant, je n'ai rien avale depuis la veille!
Je me dirige vers celui qui distribue les plateaux, il porte une jolie kurta beige ainsi qu'un beau turban assorti. Il me fixe d'un regard mefiant et semble vouloir me disuader de manger la. Bien sur, je comprends rien mais j'arrive a lui faire comprendre que je sais ce que je fais. A l'etage, la simplicite reigne; dans un grand refectoire, une bonne centaine de personne sont assises en tailleur, se faisant face en ligne. Je m'installe dans l'une d'elle. Commence alors une demonstration d'efficacite, un vieil indien avec une longue barbe noire passe pour distribuer le Dhal a une vitesse effarante, il distribue tout ca a la louche, et quelle louche! Son ami le suis de pret, avec le riz et ne manque pas une seule gamelle, deposant sa denree a cote du Dhal. Vient alors celui qui distribue les chapatis, qui lui prends son temps pour remettre le pain dans les mains des convives. Pendant mon repas, je me sens comme qui dirait, un peu observe! On regarde mes gestes et on s'active de commentaires avec son voisin. Mais l'examen est reussi, il semble que mes camarades du moment apprecient de partager leur dejeuner avec moi. Un viendra meme me saluer et me demander ce que je fais la.
Je passerai tout l'apres midi a deambuler dans les rues agitees d'Armritsar. J'aime cette ville, il y a de la vie a chaque coin de rue. Aussi je me perdrais dans ces petites ruelles, sombres et tortueuses, faisant de tres belles rencontres fortuites.
Le soir venu, j'attrape mon petit bus local. Il s'arretera dans tous les villages sur la routes faisant monter et descendre des viellards fatigues.
Je mettrai 4h pour rejoindre Pathankot ou un bus m'attend pour Daramshala.

Sourire d'Inde, Amritsar

Sur le marche, Amritsar

Cuisine de la cantine du temple d'or, Amritsar

La cuisine du resto ou je mange un midi

Offrandes hindous devant un temple, Amritsar

Rickshawala, Amritsar

Cuisine de la cantine du temple d'or, Amritsar

Sikh rentrant de la priere au temple d'or

Temple d'or de nuit, Amritsar

Reunion Sikh, Amritsar

Sur le marche, Amritsar