"La meilleure façon de réaliser ses rêves, c'est de se réveiller!" - Paul Valéry


Saturday, December 8, 2007

Un autre jour

Je decolle de Tashkent tot le matin, apres de longs et laborieux controles a l’aeroport. Mon avion fait escale a Istanbul avant de prendre la route pour Geneve. Dans l’avion, les deux dernieres annees de ma vie defilent, tant de choses reviennent. Lorsque les roues de l’appareil touchent enfin le sol Suisse, mon cœur se serre. L’aventure s’arrete ici. Devant la hall de l’aeroport, ma petite sœur est venue me chercher. Je la serre de toutes mes forces dans mes bras et nous prenons la route de la maison dans son magnifique 4x4.
Sur la route, je pose un regard emmerveille sur le monde qui m’entoure. Rien n’a change. Moi peut-etre. De vieux souvenirs me reviennent a l’esprit lorsque je traverse ces petits villages que je connais bien. A mon arrivee, je monte lentement les escaliers qui me menent dans le salon de la maison. Mes parents ne savent pas que je reviens aujourd’hui. Ils sont assis la, dans le canape, se rechauffant au coin du feu dans un apres midi pluvieux d’hiver. Ma mere tient dans ses bras mon petit neuveu, Clement 6 mois, que je vois ici pour la premiere fois. Je m'avance lentement vers mes deux parents et serre mon pere en pleur de toutes mes forces dans mes bras.
Des larmes roulent sur mes joues.

Parceque la Terre est belle et qu’elle merite d’etre visitee, parcequ’on a a apprendre de chaque homme sur cette planete, parceque le bonheur ne se compte pas en Euro, parceque l’Homme est aussi riche et genereux, parceque certaines choses toutes proches se comprennent seul au bout du monde.

‘A man travels the world over in search of what he needs, and returns home to find it.’ – George Moore

Je suis a la maison. Et j’ai trouve ce que j’etais parti chercher.


Julien -



Saturday, December 1, 2007

Sur la route de la Soie, partie 7 (Bukhara-Samarkand)

‘We travel not for trafficking alone,
By hotter winds our fiery hearts are fanned
For lust of knowing what should not be kown
We take the Golden Road to Samarkand.’


Ce sont les derniers versets du poeme de James Elroy Flecker ‘The Golden Journey to Samarkand’ evoquant la romance de la plus glorieuse ville d’Ouzbekistan. Aucun autre nom n’est si evocatif pour la route de la Soie que Samarkand. Pour la plupart des gens, Samarkand a la resonance mystique d’Atlantis, figee dans l’imagination par les poetes et les ecrivains d’une epoque revolue, dont peu virent la ville en chair et en os.
Sa position strategique au carrefour entre la Chine, l’Inde et la Perse, en a fait une des villes les plus riches et certainement la plus magnifique du monde pendant des siecles. Son sol attisait les convoitises des peuples Turks, Arabes, Perses, Mongoles et Khorezms qui livrerent bataille pendant des siecles pour le pouvoir de la glorieuse ville d’Asie Centrale. Alexandre le Grand aurait lui-même dit apres avoir pris la ville en 329 BC: ‘Everything I have heard about Samarkand is true, except that it’s more beautiful than I ever imagined’.
Je fais route vers Bukhara, une autre de ces villes qui ont fait jadis la gloire des royaumes qui se sont succedes dans l’actuel Ouzbekistan. 7h de bus me sont necessaire pour rejoindre la cite. Sur la route, nous traversons l’aride desert du Kyzylkum eclaire par une lumiere rasante d’un chaud coucher de soleil, ou nous attendent tous les 30 km des postes de contrôle de l’armee Ouzbek. A chaque arret, des officiers armes fouillent les soutes du vieux bus et des controles de passeport inopines sevissent a l'interieur.
J’arrive de nuit dans la cite et je pars le lendemain visiter la ville ou regne une atmosphere particuliere. Je reste ébahi devant la beaute de la Mir-i-Arab medressa, dont la devanture est tout simplement magnifique. Elle reflete a elle seule la beaute du lieu. Des milliers de carreaux en fayence composent des fresques qui s’agencent avec une douceur et une logique surprenante. Je reste des heures dans la mosquee Kalon, a admirer la grandeur qu’elle degage. Dans la Mir-i-Arab medressa, de jeunes ouzbeks tres bien habilles vont et viennent, tels des hommes d’affaires. Le lieu semble renfermer une certaine elite, et l’atmosphere qui s’y degage est impressionante de sagesse et de prestance.
Je passe 5 jours environ dans la vieille cite, m’inspirant de ses nombreuses mosquees et medressas et rencontrant de tres acceuillants autochtones. Le lendemain, je prends la route pour Samarkand.
Je penetre de nuit dans la glorieuse cite Ouzbek, apres 6h de bus environ. Quand apparaissent devant moi le Shah-i-Zinda et la Bibi-Khanym mosque eclaires par des jeux de lumieres forts biens agences, je suis tout simplement ebahi. Ils semblent tous deux regner sur la ville, tel les gardiens de l’entree Nord. J’appercois de loin le sublime Registan, qui m’impressionne par son imposante posture. Mais ce n’est que le lendemain matin que je me rends vraiment compte de la beaute du site. Je pars en direction du Registan tot le matin et lorsque je m’en approche assez pour realiser devant quel monument je me trouve, je pousse un ‘Wouah!!’ incontrole et qui parle de lui-meme. Je suis souffle devant le majesteux monument qui deborde a la fois de beaute et de simplicite. Le travail des carreaux de Fayence est superbe. Il semble d’un art et d’une architecture qui m’est inconnu et pourtant ses lignes et ses couleurs s’agencent a merveille.
A l’interieur, l’or finement travaille regne. Le toit, orne de fines feuilles d’or donne une impression de relief au plafond desesperement plat. Une poignee de touristes russes sont la aussi, mais le site reste calme et semble veiller sur la ville. Je pose un regard plus qu’admiratif sur ces monuments charges d’histoire qui font a eux seuls revivre la glorieuse cite.
Le Guri Amir me semble un chef d’œuvre d’architecture et je reste admiratif devant la beaute de sa majesteuse porte d’entree. Je ne saurais decrire exactement ce qui me plait dans cet art, sa difference peut-etre. La juxtaposition des carreaux alliee a une architecture contrastee en font des œuvres uniques.
Je passe plusieurs jours dans la cite, m’aventurant au Sud, en direction de la frontiere Afghane. Lorsque je reviens a Samarkand, je m’inspire une nouvelle fois du mystere qui regne en ces murs. J’admire le Registan et le Guri Amir de nuit, comme deux joyaux qui eclairent meme les nuits les plus noires. Je deambule dans son histoire et me perds dans ses conquetes. Le dernier soir, je me pose tranquillement sur un banc qui fait face au Registan. Je suis au calme. Une legere brise berce le lieu et les reflets des carreaux des medressas sous la lumiere des projecteurs semblent d’un autre age. Samarkand qui a fait reve plus d’un homme continu encore a en faire rever aujourd’hui, et continuera certainement encore longtemps.
C’est aussi ici que j’ai decide d’achever ce fabuleux voyage de 2 mois sur les traces des caravanes de la route de la Soie, ainsi que ma vie de 1 an et 8 mois en Asie.
Demain, je rentre a Tashkent ou un avion me ramene en France.

Vieil Ouzbek, Bukhara, Ouzbekistan

Minaret de la mosquee Bibi-Khanym, Samarkand, Ouzbekistan

Minaret Kalon, Bukhara, Ouzbekistan


Vieil Ouzbek, Samarkand, Ouzbekistan

Sher Dor medressa, Samarkand, Ouzbekistan

Au detour d'une ruelle, Bukhara, Ouzbekistan

Kalon Mosque, Bukhara, Ouzbekistan

Mosaique de la Mir-i-Arab medressa, Bukhara, Ouzbekistan

Vieil homme au detour d'une ruelle, Bukhara, Ouzbekistan

Plafond de la Tilla-Kari Medressa, Samarkand, Ouzbekistan

Guri Amir Mausoleum, Samarkand, Ouzbekistan

Entree du Guri Amir Mausoleum, Samarkand, Ouzbekistan

Vendeur de tapis, Bukhara, Ouzbekistan

Au detour d'une ruelle, Bukhara, Ouzbekistan

Mir-i-Arab medressa, Bukhara, Ouzbekistan

Vieil Ouzbek, Bukhara, Ouzbekistan

Sur le marche, Bukhara, Ouzbekistan

Mir-i-Arab medressa, Bukhara, Ouzbekistan

Vieux Ouzbeks devant la Mir-i-Arab medressa, Bukhara, Ouzbekistan
Ces hommes degageaient une superbe prestance,assez bien rendu par le cliche.

Ecritures dorees dans la Tilla-Kari Medressa, Samarkand, Ouzbekistan

Vieil Ouzbek au detour d'une ruelle, Bukhara, Ouzbekistan

Vieille Ouzbek au detour d'une ruelle, Bukhara, Ouzbekistan

Kalon Mosque, Bukhara, Ouzbekistan

Soieries, Bukhara, Ouzbekistan

Sur le marche de Bukhara, Ouzbekistan

Entree du Guri Amir Mausoleum, Samarkand, Ouzbekistan

Mir-i-Arab medressa, Bukhara, Ouzbekistan

Vieil Ouzbek, Urgut, Ouzbekistan

Solitude d'un vieil Ouzbek, Bukhara, Ouzbekistan

Ulugbek Medressa, Samarkand, Ouzbekistan

Au detour d'une ruelle, Bukhara, Ouzbekistan

Fayence du Shah-i-Zinda, Samarkand, Ouzbekistan

Sur la route de la Soie, partie 6 (Karakalpakstan-Khorezm)

J’attrape de justesse mon train de nuit qui me mene a Kungrad, toujours ma pasteque a la main ! A bord, les dortoirs sont exigues mais ils me semblent bien plus confortables que ceux que j’ai pu emprunter en Inde. Je fais route avec une petite famille Ouzbek, qui accepte volontiers de partager la pasteque de Marmut avec moi. Quel bonheur ! J’aimerais qu’ils en reprennent pour faire encore diminuer le fruit de poids!
Plus loin, une Karakalpak avec son mari Turkmen me font la conversation pendant la longue journee grise ou nous traversons le desert du Kyzylkum. J’arrive a Kungrad le lendemain au soir, un peu fatigue apres 27h de train. Kungrad est une petite ville de la republique du Karakalpakstan, region plus ou moins autonome d’Ouzbekistan ou vit un autre peuple, les Karakalpaks, dont la langue et les origines les differencient des Ouzbeks. Je n’ai pas Kungrad dans mon guide et a peine sur ma carte. Je descends du train dans une nuit froide et brumeuse sans vraiment savoir ou je vais pouvoir dormir. J’aimerais rejoindre Moynaq, ancien port de la mer d’Aral, a 3h de route de la, mais le seul bus de la journee est deja passe depuis longtemps. Aucun hotel a l’horizon. Je me retourne alors vers un passager avec qui j’ai fait route et l’homme m’invite a le suivre. Il me conduit tout droit vers la gare ferroviaire et m’aide a degauter une petite chambre spartiate mais au combien appreciable. L’homme est adorable et m’accompagne dans toutes les demarches. Il semblerait que les gens du coin soient tout aussi accueillants que dans le reste du pays.
Le lendemain, je pars mon gros sac sur le dos vers la station de bus de la ville. La, j’essaie tant bien que mal de savoir a quelle heure le prochain bus pour Moynaq quitte la gare. Les avis divergent ! J’arrive tout de meme a saisir qu’il n’y en a qu’un par jour, il s’agit de ne pas le rater ! Il est 10h du matin a mon arrivee et les gens s’accordent a me dire que le bus ne partira pas avant 16h ! Magnifique ! Une journee a Kungrad! Qui n’a jamais reve de passer une journee a Kungrad ??!!
Sur les quais de la gare routiere, une vieux Karakalpak, dont les lunettes aux verres epais masquent un regard malicieux attend patiemment le depart de son bus. L’homme me sourit timidement et semble curieux a mon egard. A ses cote, une petite Karakalpak dans une longue robe verte a fleur le taquine et se joue a le mettre mal a l’aise. Je prends un cliche du vieux monsieur, qui semble ravi de se voir en photo! C’est alors que la vieille dame attrape mon bras et me tire en s’ecriant ‘Photo ! Photo !’. Je pense alors qu’elle veux que je photographie deux de ses amis accoudes a une fenetre de la vieille station de bus. La petite dame me pousse alors a l’interieur d’un vieux batiment ou je fais face a un labo photo flambant neuf! Tout y est ! Ordinateur, lecteur de carte memoire et surtout, une magnifique machine a developper les photos ! Le regard de la vieille dame brille de malice. Elle a un sourire jusqu’aux oreilles! Je suis perdu dans une bourgade au fond du Karakalpakstan, aux confins du desert du Kyzylkum, et je fais face a un labo photo dernier cri ! Bon, il faut bien avouer que je suis le seul client! Je prends une photo avec la petite dame devant un fond cartonne de mauvais gout que le photographe expose fierement devant sa vitrine. J’en fait tirer deux, une pour moi et une pour la vieille dame. Mais je peux surtout tirer un cliche du portait du vieux Karakalpak qui attend dehors. Tout est fait en deux minutes ! Je ressors alors du batiment avec la vielle dame et la, stupeur ! Le vieil homme est parti ! Je parcours la vieille gare de bus de part en part, mais rien! Un sentiment de profonde tristesse s’empare de moi. J’aurais tant aime offrir ce cliche au vieil homme, en main propre, et combler toutes les frustrations que j’ai eu sur ma route, de gens qui auraient tout donne pour une seule de ces photos. C’etait pour moi l’occasion de me venger, de faire un simple cadeau qui a un autre prix en ces lieux.
Je parcours de fond en comble la station sans succes. Je vois mes espoirs s’amenuiser. Quand soudain, ma petite Karakalpak me fait de grands signes au loin ! Il semblerait que la vieille dame l’ai retrouve! L’homme est en fait deja dans son bus, attendant patiemment son depart! Je monte alors dans le vehicule et tends le cliche au vieil homme. Il s’en empare avec une certaine curiosite. J’observe alors un enorme sourire se dessiner sur le visage ride du vieil homme. Une douceur indescriptible se degage de son visage. Un de ces sourires que les mots ne sauraient decrire. Il resume a lui seul la joie qu’envahie l’homme. Il me regarde alors furtivement et me remercie plusieurs fois par une chaude poignee de main; mais ne tarde pas a replacer son regard sur la photographie qu’il n’aurait espere. Je suis tout aussi emu que lui de pouvoir lui offrir son portrait. C’est un tres beau moment de douceur. Je laisse ensuite partir le vieil homme avec son precieux cadeau qu’il glisse delicatement dans la poche exterieure de sa longue gabardine. Quant a moi, je repars attendre mon bus, de l’autre cote de la gare.
Pendant mon attente, je retournerai developper le portrait de deux vieux Kazakh avec qui je discute un long moment. Ils sont tout aussi heureux de recevoir la photo et la place tous deux en securite dans la poche interieure de leur veste usee. Un d’eux tient a me payer le cliche en sortant quelques billets se vieille poche dechiree. J’assure au vieil homme que je leur offre. Les deux hommes sont heureux comme jamais et ne decrochent plus une seule seconde leur regard de la photographie!
Lorsque mon minibus arrive enfin, il est plein a craquer. J’arrive tout de meme a me faire une petite place dans le vieux minivan sovietique, coince entre un Kazakh et une vieille Karakalpak tenant serre contre son torse sa petite fille de quelques mois. Nous faisons a peine deux kilometres avant l’engin ne ralentisse doucement pour finir sa course sur le bas cote. De droles de bruits peu rassurants se sont fait entendre avant la panne. Avec les trois autres hommes que compte notre bus, nous nous mettons a pousser l’engin sur quelques metres pour le remettre en selle! La vieille carlingue redemarre ! Magnifique ! Je remonte a bord et nous voila reparti…pour 200m ! Re-belotte, nous repoussons l’engin et la machine redemarre mais seulement pour quelques metres… Apres une vingtaine de tentatives pour redemarrer le vieux bus sovietique, le conducteur se decide enfin a mettre les mains dans le cambouis! Apres une bonne heure de reparation, nous tentons de redemarrer l’engin. Mais rien n’y fait! Maintenant la machine refuse meme de demarrer ! Il semblerait que j’ai trouve meilleur que moi en mecanique! Je recupere mon gros sac dans le minivan et prie pour que quelqu’un passe sur cette route paumee ! C’est alors que passe un tout petit bus, ou 4 places assises subsistes. Je les laisses aux femmes et aux enfants du minibus en panne et pense attraper le prochain; enfin si il y en a un ! Mais un Kazakh au sourire genereux me fait signe de les rejoindre et tout le monde se serre dans le mini van pour me faire une petite place. Je trouve ca adorable. J’etais resigne a attendre un prochain transport mais leur generosite est si touchante que j’accepte volontiers de les rejoindre dans le petit bus, serre comme des sardines ! Sur la route, le soleil couchant eclaire un ciel d’un rouge-mauve rare. Depuis mon arrivee dans le pays, j’assiste tous les soirs a un festival de couleurs pendant les couchers de soleil. Celui-la est particulierement magnifique. Des tons rouges vifs se refletent dans tous les nuages du ciel. J’ai rarement vu un ciel aussi beau!
L’homme qui est assis derriere moi s’appelle Aydos. Il est Kazakh. C’est lui mememe souriait pour que je monte dans le minibus. Aydos a toujours le sourire aux levres et on discute un long moment en chemin. L’homme se propose tout naturellement de m’heberger pour la nuit. Il est adorable. J’accepte bien volontiers car je ne suis pas sur de trouver un hotel dans cette ville! A notre arrivee a Moynaq, nous nous dirigeons dans l’obscurite vers un vieil immeuble qui semble abandonne. A l’interieur, un groupe de jeune Karakalpaks, Kazakhs et et Ouzbeks avalent leur diner dans une vieille cuisine sale. Les hommes m’acceuillent chaleureusement et s’empressent de me faire une petite place sur la longue table de salon pour avaler une soupe de legumes chaude. Ils sont tous adorables. Ils m’invitent a partager avec eux leur diner et me preparent ensuite un petit lit douillet dans une des chambres pour la nuit. Je comprends assez vite qu’ils travaillent tous pour une station petroliere installee dans le desert de la mer d’aral. Moynaq etait il y a encore 20 ans environ un grand port de peche, nichee aux abords de la mer d’aral. Mais la politique agricole de l’ex URSS, tournee vers un developpement de la culture du coton en Ouzbekistan en a decide autrement. Les affluents de la mer d’aral, pour la plupart provenant du Kazakhstan ont ete devie pour alimenter en eau les plaines arides d’Ouzbekistan et y cultiver le coton en masse. Resultat, la mer d’aral s’est asechee, laissant place a un desert aride de plusieurs centaines de kilometres carres. C’est un des plus grands desastres ecologiques de la planete. Ironie du sort, les habitants du Karakalpakstan sont maintenant contraints de cultiver ce qui leur a fait perdre leur mer, et leur pays, car il n’y a rien d’autre. A perte de vue, des champs de cotons pullulent sous le soleil aride du desert du Kyzylkum, irrigues par des canaux qui semblent venir de nulle part.
A table nous discutons de beaucoup de choses. Pamir, un jeune Karakalpak parle un peu anglais. Il m’est precieux pour traduire quelques phrases et me permettre de mieux m’inisser parmis le groupe. Ikram, son jeune ami, est Kazakh lui aussi. Je reste un moment avec Pamir et Ikram apres que le reste du groupe ait rejoint son lit. Nous parlons foot. Ikram m’apprend qu’il aime le championnat Français et lorsque je lui demande quelle equipe, le jeune homme me repond ‘l’OM’ d’un air convaincant ! Je ne peux m’empecher de rire! J’ai traverse tout l’Ouzbekistan pour finir au fin fond du desert du Kyzylkum et je tombe sur un supporter de l’OM Kazakh! Je lui pose quelques questions mais il connaît bien mieux les joueurs que moi! Je lui dis que personnellement j’aime bien Lyon mais l’homme me retorque que l’OM est un bien plus grand club. Pour etre sur de ne pas le vexer, j’ajoute ironiquement que je n’ai rien contre l’OM!
Nous parlons egalement de la retention de l’information qui sevit sur le net et dans les journaux en Ouzbekistan. Ils sont bien conscients que beaucoup de sites leur sont interdits d’acces par leur gouvernement. Lorsque je demande a Pamir si il est Ouzbek, le jeune garcon me repond qu’il est Karakalpak et que nous nous trouvons dans la republique du Karakalpakstan! Il ajoute egalement que la republique du Karakalpakstan pourrait etre independante si elle le desirait! Et que tout ceci est ecrit dans la constitution! J’ose reprendre le jeune homme en lui disant que la constitution dans ce pays n’a que peu de valeur, et que je doute que Karimov leur laissera un jour leur independance. Quand bien meme ils l’obtiendraient, le karakalpakstan est certainement la region la plus pauvre d’Ouzbekistan, et sans l’appui du gouvernement et la culture du coton, la petite republique independante n’irait pas bien loin. Mais je sens bien dans les yeux de Pamir qu’il sait deja tout ca. D’ailleurs, il me demande si en France lorsque l’on n’est pas d’accord avec une decision du gouvernement, on descend dans la rue et on proteste. Je lui reponds que ‘oui’. Le jeune garcon baisse alors les yeux et m’avoue sur un ton fataliste qu’en Ouzbekistan, il leur est impossible de faire ca.
J’aime bien Pamir, c’est un jeune garcon gentil et tres genereux. Il vient passer 4 mois sur la station petroliere et ce soir sa mere lui a fait parvenir des affaires depuis son domicile a Nukus, la capitale du Karakalpakstan, a 4h de route de la. Le jeune garcon a recu du pain et des bonbons pour le mois. Sa generosite me surprend. Il n’hesite pas une seconde a mettre en commun tout ce qu’il a recu en cadeau de sa mere et partage bonbons et pain avec toute l’equipe et s’assure que je me sers egalement. Parmis tout ce qu’il a recu, je comprends vite que certaines choses ont enormement de valeur ici, recule comme nous sommes. Mais le jeune garcon partage tout, sans exception. Je suis touche par sa gentillesse et sa generosite. Lorsque je demande a Aydos combien la nuit va me couter, l’homme rigole et Pamir me reprend aussitôt en me disant que je suis leur invite! Demain, ils partent tres tot car leur station petroliere se trouve a une centaine de kilometres dans l’ancienne mer d’aral.
Le lendemain matin, je prends tranquillement mon petit dejeuner avec le cuisinier de l’equipe quand un homme habille d’un costume gris fonce depourvu de cravate accompagne de deux autres personnes fait irruption dans la vieille cuisine. Il s’appelle Shukrat. C’est le directeur de la station petroliere. Le cuisinier se met presque au garde a vous. Moi, j’essaie de me faire tout petit car je sais bien que je n’ai pas le droit d’etre la. Je dois normalement dormir dans des hotels autorises a acceuillir des etrangers et m’enregistrer aupres de la police tous les soirs, ce que je n’ai pas fait la nuit derniere. Je peux avoir de serieux problemes si je ne le fais pas. Mais l’homme semble bien peu soucieux de ces details et est tres content de faire ma connaissance. Il me confie qu’ils sont en route pour la station petroliere et que je peux me joindre a eux si je le souhaite. J’accepte volontiers, sans trop savoir dans quoi je m’aventure! Les trois hommes ont un tres beau 4x4, ma condition pour que je me joigne a eux. En effet, le mer d’aral est maintenant un desert, fait d’arbustes et de sable. Il peut s’averer tres imprudent de s’aventurer dans ce desert sans 4x4 et sans une bonne connaissance du terrain. Les voitures ou motos s’enlisant frequemment dans le sable, et les imprudents se perdant sur ses routes pour lesquelles il n’existe aucune cartographie. Une panne au milieu du desert ou personne ne passe peut tourner tres vite au drame.
La voiture traverse l’ancien port de peche du Sud au Nord. De part et d’autre de la route, de vieilles palissades en roseaux cachent de petites maisons laissees a l’abandon. Un air de desolation regne dans cette ville. Quelques vieux Karakalpaks arpentent les rues, mais il semble que la mort et le desespoir les entourent. Je vois des enfants jouer dans de vieilles carcasses de chalutier rouillees. Partout, un sentiment d’abandon regne. Lorsque nous atteignons le bord de mer, nous faisons face a un immense vide. Un vent marin souffle pourtant. Je descends quelques minutes et observe ce desastre indescriptible. C’est etrange. Tout y est! Des dunes de sable font barriere a l’ancienne mer, de vieux chalutiers rouilles gisent au milieu des arbustes et quelques pontons rappellent le port de peche, mais il manque l’essentiel. Derriere, quelques pancartes surmontees d’un poisson rappellent le bon vieux temps. Lorsque nous penetrons dans le desert de l’ancienne mer d’aral, Shukrat s’exclame non sans degout: ‘Where is the sea?? !!’. A quelques kilometres de la, dans des canaux qui irriguent les champs de cotons…
Nous roulons 1 bonne heure sur les pistes de sable quand tout a coups! La vitesse du 4x4 saute pour passer en 4X2: notre 4x4 n’est plus en 4 roues motrices et il s’enlise tres vite profondement dans le sable! Je ne suis pas rassure. Il n’y a rien a 70 kilometres a la ronde, et qui sait quand quelqu’un repassera par la! Marcher dans ce desert serait du suicide. Je suis enlise dans ce desert avec 3 hommes que je ne connais pas, sans eau ni nourriture, et personne pour nous localiser! J’avoue que je ne suis vraiment pas rassure. Je descends du vehicule et suis motive comme jamais pour sortir la voiture de la. Les roues du gros 4x4 sont a moitie dans le sable et Shukrat semble lui-même bien embete. Nous tentons de degager les roues du vehicule pendant de longues minutes sans vraiment savoir si nous arriverons a le sortir de la. Le chauffeur fait plusieurs tentatives pour sortir mais rien n’y fait, le 4x4 ne bouge pas d’un poil! Je commence serieusement a m’inquieter mais essaie de garder mon sang froid et repars deblayer les roues de l’engin, c’est la seule chose a faire!
Apres de longues minutes de travail, les roues ont la voie un peu plus libre et heureusement, nous avons dans le coffre deux petites planches en bois que nous glissons devant les roues. Je prie pour que le 4x4 prenne assez de vitesse sur ses petits morceaux de bois et se sorte de la! Lorsque le chauffeur tente de sortir, les deux calles gilclent a l’arriere du vehicule et le 4x4 reussi a prendre assez de vitesse pour faire quelques metres et se sortir de ces hautes dunes de sable! Ouf !! Un sentiment de soulagement extreme m’envahi! Je n’ose imaginer ce que nous aurions fait si nous avions echoue.
En chemin, Shukrat m’avoue que la station petroliere ou nous nous rendons est une station secrete. Autrement dit, que je n’ai rien vu! Bien sur, interdiction formelle de prendre des photos, c’est une station geophysique Russo-Ouzbek et Shukrat est en fait le directeur de la compagnie Ouzbek. Shukrat m’assure que je pourrai rencontrer son homologue russe a notre arrivee. Je suis ravi!
Lorsque nous approchons du camps, des mobile-home se dessinent au loin et j’appercois les drapeaux Russe et Ouzbek qui flottent fierement sur la base. De grands russes trapus habilles en militaire passent d’une roulotte a une autre, des chars a chenille stagnent devant le camps, tandis que de vieux camions sovietiques attendent leur chauffeur a l’exterieur de l’enceinte. Tout y est! Cela ressemble a s’y meprendre a une base secrete russe dans un film de James Bond! Le chef de la base russe ne tarde pas a me passer un interrogatoire muscle, sur un ton inquisiteur: Mon nom, mon passeport, ce que je fais la,…? Euh…?? Du tourisme ?? L’homme semble tres mefiant a mon egard et semble vouloir s’assurer que je dis la verite. Apres quelques minutes d’explications, il semble satisfait et me laisse me balader dans la base, avec un de ses hommes tout de meme! Le camps est compose de russes, d’Ouzbeks, de Kazakhs et de Karakalpaks. J’arrive a comprendre qu’ils etudient la topologie du sol pour localiser les lieux ou extraire le petrole. Je passe la journee avec un Ouzbek adorable qui ne me lache pas d’un fil! Je me sens bien surveille sur le camps, un homme me suit en permanence! Je n’ai pas acces a tous les batiments. Apres plusieurs heures, Shukrat a fini sa journee de travail et nous repartons vers Moynak. Je dis au revoir a tous les Kazakhs et Ouzbeks avec qui j’ai sympathise durant la journee et nous reprenons la route. Le soir, Shukrat repars vers Nukus et Tashkent. Je le remercie pour m’avoir amene avec lui cette journee et repars vers la maison des Kazakhs qui travaillent dans la station de petrole. Ils rentrent tard ce soir, 22h environ. Lorsqu’ils penetrent dans la cuisine, je lis sur les jeunes visages beaucoup de fatigue. Pamir semble extenue. Ils sont partis a 5h ce matin et ne rentrent qu’a 22h. Je suis impressionne par leur courage et leur devotion. Ce sont des hommes solides. Demain, je dois reprendre ma route vers Khiva. Je les remercie alors tous un par un avant de prendre quelques photos du groupe. Aydos me serre fort dans ses bras, toujours le sourire aux levres! Ils ont ete adorables avec moi. Je leur promets de leur envoyer les photos qu’ils n’auront que l’annee prochaine, lorsque la nouvelle equipe viendra prendre la releve.
Le lendemain, j’attrape un bus pour Khiva. Je passe 11h a voyager, devant changer trois fois de bus dans des petits bleds qui figurent a peine sur ma carte. J’arrive le soir a Khiva, un peu fatigue par ce long voyage et trouve une petite auberge pour passer la nuit. Des le lendemain, j’arpente les vieilles rues de la cite fortifiee, non sans une certaine curiosite. La ville est extremement bien conservee, ses petites ruelles etroites sont intactes. Partout, de grandes portes en bois vieilli donnent acces a de larges cours interieures de Medressas. Le lieu semble d’epoque ; trop peut-etre. Le soir je trouve un endroit isole et en hauteur pour admirer la lumiere chaude du soleil de Khorezm nimber la vieille cite. C’est magnifique. Je savoure ce moment de solitude et admire le paysage particulier qui s’offre a moi. J’imagine la vie qui a regne en ces murs et contemple avec admiration ce qui fut jadis la merveille de Khorezm.
Je passe plusieurs jour a Khiva, rencontrant de forts acceuillants Ouzbeks avant de prendre un bus de 6h pour Bukhara et Samarkand.

Photo qui aurait pu me valoir un sejour derriere
les barreaux, desert de la mer d'aral, Ouzbekistan

Vieux Karakalpak a qui j'offre le portrait, Kungrad, Ouzbekistan

Scene de desolation dans le desert de la mer d'aral, Moynaq, Ouzbekistan

Vieille Karakalpak avec qui je fais route vers Moynaq, Ouzbekistan

Scene de desolation dans le desert de la mer d'aral, Moynaq, Ouzbekistan

Vieux Kazakh, Kungrad, Ouzbekistan

Vieille Karakalpak dans le train, Ouzbekistan

Kalta Minor minaret, Khiva, Ouzbekistan

Alloquli khan medressa, Khiva, Ouzbekistan

Sur le marche de Khiva, Ouzbekistan

Piments seches, marche de Khiva, Ouzbekistan

Vieille vendeuse de legumes, Khiva, Ouzbekistan

Au detour d'une rue, Khiva, Ouzbekistan

Humm??!!...Canon?! Ca se mange ca??

Pahlavon Mahmud Mausoleum, Khiva, Ouzbekistan

Vieil homme au detour d'une rue, Khiva, Ouzbekistan

Au detour d'une ruelle, Khiva, Ouzbekistan

Minaret Islom-Hoja, Khiva, Ouzbekistan

Vieux vendeur de fruits, Khiva, Ouzbekistan

Remparts de la ville, Khiva, Ouzbekistan

Au detour d'une ruelle, Khiva, Ouzbekistan

Minaret Islom-Hoja au coucher du soleil, Khiva, Ouzbekistan

Soiries, Khiva, Ouzbekistan

Vieux Ouzbeks au detour d'une rue, Khiva, Ouzbekistan

Au detour d'une ruelle, Khiva, Ouzbekistan

Sur le marche de Khiva, Ouzbekistan

Mohammed Rakhim Khan medressa, Khiva, Ouzbekistan

Porte Ouest de la cite, Khiva, Ouzbekistan

Remparts de la cite, Khiva, Ouzbekistan

Khiva, Ouzbekistan

Dans le Pahlavon Mahmud Mausoleum, Khiva, Ouzbekistan

Sur le marche de Khiva, Ouzbekistan